© Archives du Gard

L’histoire de la sériciculture
(culture du mûrier et élevage des vers à soie) et de la filature est très ancienne en Cévennes. En effet, les activités manufacturières urbaines reposaient sur cette activité agricole indispensable. Les cocons cévenols servaient à approvisionner les manufactures nîmoises. Mais il faudra attendre l’époque moderne pour qu’arrive le temps de l’industrialisation.

Les Cévennes

Pays de la soie

Su XVIIIe siècle, les Cévennes deviennent la première région du royaume pour la production de soie. De nombreux paysans se tournent vers la sériciculture. À cette époque, chaque paysan dispose de ses propres cocons qu’il file lui-même dans son habitation en revendant sa modeste production à des négociants spécialisés chargés de l’exportation. À la veille de la Révolution, la région gangeoise compte ainsi 36 fabricants. L’habitat subit plusieurs transformations pour augmenter les capacités de production et améliorer les rendements. La magnanerie (salle d’élevage des vers à soie) est ainsi installée sous les toits.
La sériciculture pratiquée de manière accessoire au début du XVIIIe siècle dans l’arrière-pays gardois, devient vite une activité agricole de premier rang face à la demande exponentielle des soyeux nîmois qui délaissent les importations de matières premières
coûteuses en droits de douane.
Des aides sont octroyées aux cultivateurs par le pouvoir royal et les états du Languedoc pour multiplier la plantation des mûriers et les élevages à partir des années 1740.

Zoom

Vers à soie : Pasteur dans le Gard
L’année 1853 marque l’apogée de la production française de cocons avec 26 000 tonnes de cocons produites dont la moitié par le département du Gard. Cette croissance exponentielle va rapidement être stoppée avec l’arrivée de la pébrine, maladie du ver à soie, qui empêche le ver de s’entourer des fibres de soie constituant son cocon. La propagation de cette épidémie à partir de 1849 constitue le début de la crise séricicole. Le chimiste Jean-Baptiste Dumas, originaire d’Alès, sénateur et ancien ministre de l’Agriculture et du Commerce sollicite l’aide de Louis Pasteur, chimiste de renom, pour éradiquer la maladie. Pasteur viendra à cinq reprises dans le Gard entre 1865 et 1869 pour étudier le ver à soie. Il parviendra à trouver une méthode permettant d’éradiquer la pébrine, la maladie du ver à soie.
Après chaque ponte, les papillons qui ont pondu les œufs doivent être examinés au microscope pour vérifier qu’ils ne soient pas porteurs de la maladie./strong>

© Arsoie Cervin

À Sumène

Un savoir-faire unique au monde

L’Arsoie est la seule entreprise à fabriquer des bas de soie sur des anciennes machines traditionnelles. Ces métiers à tisser constituent un patrimoine industriel unique. Ils sont d’ailleurs classés au titre des monuments historiques.

La manufacture de bas de luxe L’Arsoie (littéralement l’art de la soie) perpétue une tradition et un savoir-faire ancestral. C’est aussi et surtout une histoire familiale qui perdure depuis 3 générations. Fondée en 1918 à Sumène dans les Cévennes par Auguste Massal, l’entreprise débute son activité par l’emballage de bas de soie. Dès 1920, Germain Massal, au décès de son frère, reprend l’affaire et se lance dans la fabrication de bas qu’il emballe dans de luxueuses boîtes. Ces bas sillonneront le monde, de l’Argentine à la Russie, et approvisionneront les cours royales et impériales d’Europe. En 1953, André (le père de Serge, actuel Président directeur général) succède à son oncle et crée la marque « Cervin », en référence aux sommets cristallins alpins dont était originaire Auguste. Dans les années 50, le bassin Ganges-Sumène-Le Vigan, berceau de la fabrication traditionnelle du bas, compte jusqu’à 50 entreprises…mais à partir de 1955, la fabrication de collants sur métiers circulaires sonne le glas du bas-couture et la production cévenole de bas de soie est abandonnée. En 1986, Serge Massal débute dans l’entreprise familiale. Il en devient PDG dix ans plus tard et donne un nouvel élan à l’entreprise avec la volonté de reproduire de la soie. L’entreprise suménoise déniche alors deux métiers à tisser inutilisés, sauvés d’une destruction certaine ou de la revente au poids.

Ces machines sont hors normes : 17 mètres d’un seul tenant, constituées de 120 000 pièces pour un poids d’environ 17 tonnes. Les monstres de fonte et d’acier ont dû être rentrés en deux parties. « Les dizaines de milliers de pièces qui les composent ont été démontées, dépouillées de leur rouille, refabriquées pour certaines. Puis il a fallu reconstituer les métiers à tisser et surtout les régler pour harmoniser les aiguilles… » précise Serge Massal. Trois tonnes de pièces détachées ont été récupérées pour la remise en état et deux ans ont ensuite été nécessaires aux réglages. En 1999, les machines sont remises en action.

 D’une valeur patrimoniale industrielle inestimable, ces métiers à tisser donnent aujourd’hui la possibilité unique de recréer des collections et des points de maille anciens. L’entreprise, labellisée « patrimoine vivant », est reconnue mondialement pour son savoir-faire dans la confection traditionnelle des bas de luxe en soie et de nylon.
Les produits de l’Arsoie ont habillé les jambes des meneuses de revue du Crazy Horse, de Catherine Deneuve ou encore de Beyoncé !

avis

Quatre machines exceptionnelles
Trois d’entre elles sont inscrites à l’inventaire national. La dernière a été sauvée de justesse de la destruction suite à la liquidation judiciaire de l’entreprise Gerbe (Saône-et-Loire) il y a maintenant 2 ans. L’entreprise Arsoie a 2 autres métiers en instance de remontage dans son usine du Vigan. Il reste en tout et pour tout 9 machines dans le monde : 5 au Royaume-Uni (4 sont opérationnelles) et les 4 machines de l’entreprise gardoise en France.

À découvrir aux Archives départementales du Gard

Expo événement « Au fil de l’eau »

Précieuse ressource naturelle aussi puissante que menacée, l’eau a marqué l’histoire et le développement du territoire gardois avec ses 8 rivières ou fleuves importants, sa côte méditerranéenne, la Camargue. C’est toute l’histoire du département qui se donne donc à voir avec cette exposition événement où sont dévoilés tous les usages de l’eau au fil des âges.
L’exposition « Au fil de l’eau » est visible aux Archives jusqu’au 30 juin 2023.

Entrée libre du lundi au vendredi de 8h30 à 17h.
Infos : archives.gard.fr

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