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Les Archives départementales du Gard
365 rue du Forez à Nîmes. Ouvertes du lundi au vendredi de 8h30 à 17h hors jours fériés. Entrée libre.Charles Gide
père de l’Économie sociale et solidaire
Les Archives départementales du Gard ont réalisé en 2021 une exposition sur le thème de l’Économie sociale et solidaire, née il y a 150 ans, notamment dans le Gard, où l’économiste Charles Gide, Uzétien de naissance, a posé les bases théoriques de cette nouvelle forme d’économie, plus respectueuse des hommes et qui encourage les formes coopératives.
En ce mois de l’Économie sociale et solidaire, comment ne pas évoquer le Gardois qui a le premier théorisé les grands principes fondateurs de cette forme d’économie coopérative ?
Né en 1847 dans une famille protestante, Charles Gide grandit à Uzès, où son père est président du tribunal civil. Moins connu du grand public que son illustre cousin écrivain André, il a toutefois un parcours exceptionnel. Après de brillantes études de droit à Paris, il enseigne comme Professeur d’Économie politique d’abord à Bordeaux (1874), puis à Montpellier (1880), et enfin à la Faculté de Droit de Paris (1898). Il enseignera également à l’École des Ponts et chaussées et à l’École Supérieure de guerre. Il est nommé au Collège de France en 1921.
Théoricien de l’Économie sociale et solidaire
Il publie en 1884 les Principes d’économie politique, manuel qui connaît un succès considérable avec 26 éditions de 1884 à 1931 et 19 traductions. Dès 1886, il devient le théoricien de ce qu’il est convenu d’appeler l’« École de Nîmes ». Ce mouvement coopératif français, actif surtout dans le Sud de la France, est animé par des protestants (Auguste Fabre, Édouard de Boyve). En 1888, l’Association protestante pour l’étude pratique des questions sociales est ainsi créée à Nîmes, avec le pasteur Fallot comme président et Charles Gide comme vice-président.
L’idée dominante est que la coopération favorise l’émancipation, en créant une structure d’apprentissage de la démocratie et de l’efficacité économique, qui permet d’abolir le régime du profit sans tomber dans l’étatisme. Ce principe de solidarité – partagé par des hommes comme Henri Marion, Émile Durkheim, Léon Bourgeois – est présenté comme la voie entre libéralisme et marxisme. Le mensuel L’Émancipation, fondé en 1886 et dans lequel Charles Gide rédigera 840 articles, permet de vulgariser la notion de coopérative. Cette idée est principalement appliquée à Nîmes où Charles Gide intègre une « Coopérative de consommation », s’intéressant aux problèmes concrets de gestion et de conflits que ces coopératives ont avec le commerce privé.
Charles Gide fondera son propre journal La Revue d’économie politique en 1887.
Christianisme social
Dreyfusard, héritier du socialisme français « associationniste », Charles Gide défend le social mais non le socialisme révolutionnaire. Dans toute son action, Charles Gide met toujours en avant une forte exigence morale. Il souligne la valeur religieuse de cette « École nouvelle », fondée sur la solidarité, en étant d’abord vice-président du mouvement du Christianisme social créé par Tommy Fallot en 1888, avant d’en prendre la présidence en 1922.
Il aborde les différents problèmes sociaux de la fin du XIXe siècle avec une relative modération, cherchant une 3e voie entre une religion aveugle au problème social et un socialisme sourd à la dimension spirituelle de l’homme.
Invité en Union des républiques socialistes soviétiques (URSS) à l’automne 1923 après une série d’articles dénonçant le bolchévisme, il reconnaît qu’une « organisation coopérative intégrale » semble possible, mais juge le communisme un peu « trop rouge ». Son œuvre, très critiquée à l’époque par la bourgeoisie comme par la gauche, est redécouverte dans la seconde moitié du XXe siècle. Dans les années 1970, l’Économie
sociale et solidaire remodèle les rapports entre l’État et le marché. Les chocs pétroliers et le retour du chômage, source d’exclusion, incitent à créer un nouveau mode de développement économique. C’est la naissance du commerce équitable et des circuits courts. Ce courant a débouché sur la loi ESS du 31 juillet 2014. Charles Gide était donc précurseur, puisqu’il abordait
déjà de nombreux problèmes économiques actuels : vieillissement de la population, problèmes de législation sociale (retraites, etc.)…
Ce regain d’intérêt entraîne le développement d’une réflexion sur ces enjeux.
Le Conseil départemental a ainsi voté son 1er Schéma départemental de l’ESS en mars 2024 (cf. p. 19) et les Archives départementales du Gard développent depuis la rentrée un partenariat sur ce thème avec l’université Vauban de Nîmes (cf. encadré page 26).
Sources : Archives départementales du Gard
Site du musée virtuel du protestantisme : museeprotestant.org
En haut : livre l’Économie Sociale de Charles Gide (1905) – Archives départementales du Gard – BIB MAR 2772
1er numéro du journal L’Émancipation (schéma d’une maison collective d’ouvriers en couverture) – 15 novembre 1886 – Archives départementales du Gard, JR 267 27